Dans le Nord aussi, les élites locales et tout ce qui, de près ou de loin, veut se faire élire se partagent le gâteau du « grand débat ». Salons chiants des mairies, salles polyvalentes et écoles maternelles aux peintures écaillées sont les tristes théâtres où se déroulent les énièmes comédies participatives, litanies démocrates et langueurs républicaines. L'inverse des luttes urbaines qui ont provoqué le vacillement de Maître Macron. Fallait l'faire quand même, emboîter tout un parti dans une salle de sport décorée pour l'occasion de drapeaux français et faireson auto-promo à coup de « cher ami » ! Rien ne l'étouffe.
Ce n'est même pas drôle de voir nos édiles s'adonner à l'exercice façon Powerpoint, partager leurs photos sur Facebook pour montrer à quel point qu'ils font « de la démocratie et du débat ». Ils ont sans doute besoin de faire connaissance entre vieux croûtons du PS et jeunes loups d'En Marche. Pendant ce temps, le peuple lillois, bien loin des ors décrépis de la république technocratique, respire les lacrymos et étouffe sous les gaz d’échappement.
On a besoin d’air à Lille, d'échapper aux pics de pollution et de répression. On veut respirer ! Et c'est un langage moins policé qui parle à travers les rues, à base de banderoles et de slogans, de canettes et de pavés. Mais ici, le débat est bien là : en manif comme en AG, sur les ronds points comme dans les occupations sauvages. De plus en plus de gilets jaunes se couvrent de noir et des "black blocs" s'improvisent jaunes. Les démonstrations d’affection à la BAC et aux keufs n'ont plus cours comme aux premiers actes, la faute à qui ? Est-ce la police qui s'est énervée d'un coup ou bien serait-ce le mouvement qui a fait l'expérience du langage policier ? Au passage, on ne vous souhaite pas de faire la connaissance de Jean-François Papineau, le nouveau « directeur départemental de la sécurité publique du Nord » (DDSP), rodé à la chasse à l'émeutier.e et qui a bien la gueule de ses idées… À quand la crémaillère ? Cacatovs dans l'air et fumier en pagaille, vraiment, ça pue trop…
Asphyxie générale dans les rues de Lille, et pas qu’à cause de l’air ambiant. La MEL promeut sa « ville de demain » à coup de centres commerciaux toujours plus grands. De son côté, la gentrification va bon train. Transpole se mue en Ilévia, toujours plus cher, toujours aussi « efficace », et qui trouve le moyen de se faire du blé les jours de pics de pollution. Des centaines de logements sont vacants, laissés en jachère pour la spéculation.
Heureusement Gérard Mulliez a la solution : « Tout le monde sera obligé de faire de la permaculture comme les ouvriers il y a 50 ans avaient leurs jardins potagers. On va revenir à ça, on ne peut pas faire autrement. » Comme quoi on n'écoute pas assez les grands patrons ! C'est beau de voir le vieux Gégé* d'aller de sa petite Pierre** à l'édifice et abonder dans le sens d'un autre monde : ils font bien leur beurre sur le mouvement à coup de protèges-gueule Quechua, de lunettes de piscine et autres protections improvisées...
On se demande d'ailleurs si ce grand patron pourra compter sur les travailleur.ses précaires, chômeur.ses, intermittent.es et autres (la liste est trop longue) qui brandissent leur gilet jaune et crient encore leur [cou]rage, loin d’être à bout de souffle pour la [perma]culture de la lutte.
Le vent de la révolte apporte son bol d'air ; Mêmes patrons, Même combat ! Pendant que les monstres d’acier remuent la poussière, des cabanes militantes poussent sur le Belvédère de la friche Saint Sauveur pour contester le projet d’aménagement délirant de la mairie. Une petite victoire, le chantier est suspendu depuis octobre par le tribunal administratif. En cause, l’absence d’étude sur la qualité de l’air…
Alors on est là, comme Don Quichotte contre les géants, on se bat contre des moulins à vent. On sait que le printemps arrive, que les fleurs vont éclore prématurément cette année. Le fond de l'air est jaune, vert, rouge, violet, noir, les couleurs sont de retour. L'arc en ciel se dessine. À voir quel camp sera le plus « bisounours » et nourri d'utopies ? Celui qui tient contre les vents et marées à imposer des projets à la con ou celui du vent qui sème la tempête et se récolte les jours de fête ! Allez, hein, bon vent !
Le collectif de La Brique
* Et pas celui de l'APU
** Et pas non-plus celui de l'APU