Carte des droites extrêmes de Lille et alentours
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Les 9 et 16 décembre 2018, Al-Jazeera diffuse deux reportages sur le bar identitaire La Citadelle intitulés « Génération Hate ». On y voit des saluts nazis, des agressions dans les rues de Lille, une litanie de propos racistes et une ribambelle de sympathisant.es plus ou moins fréquentables. Très vite, l’ensemble des médias locaux se saisit de l’affaire et publie à tour de bras des descriptions sommaires du docu ainsi que les réactions des acteur.rices locaux.ales. Aubry twitte, le préfet saisit le proc’, l’organisation Citadelle reste silencieuse un mois avant d’annoncer une « conférence de presse » qui n’en a que le nom.
Le 17 janvier dernier, la plupart des médias locaux sont là. Dès le départ, Aurélien Verhassel s’offusque qu’on ne lui ait pas donné l’occasion de « s’expliquer sur cette affaire » dans les médias. Il remercie néanmoins France 3 Web d’avoir repris le communiqué envoyé par la « Citadelle ». Déplore que 20Minutes et Grand Lille TV en aient repris des bribes. « Les autres [médias] ne m’ont pas laissé la possibilité de m’expliquer ».
On aurait pu croire ce moment « d’explication » arrivé. Le leader se désolidarise des « propos répréhensibles entendus dans ce reportage ». Un minimum. « Je les condamne et les dénonce. Ils ne sont en rien représentatifs de notre philosophie et de la ligne de notre mouvement ». Vraiment, on vous le dit, les membres du bar identitaire sont des enfants de cœur. Tout ce petit monde fréquentant le bar "privé" (donc restreint) se côtoierait sans se rendre compte des différentes affinités idéologiques (nazis, ultras, néo-fascistes ou extrémistes). Voire pire chanterait des chants bruns, narrerait leurs pitoyables exploits, pendant que le chef a le dos tourné. C’est triste.
Pacifiste convaincu maniant les armes et théorisant la violence – y compris dans le reportage, ambassadeur de la paix au casier judiciaire pourtant bien fourni pour diverses bagarres, il est impossible que des racistes ou des néo-nazis violents fréquentent le paisible bar. C’est la faute à pas de chance si « un journaliste enregistre 2-3 personnes de passage, ivres à 3h du matin, en les provoquant pour dire des inepties comme si cela était représentatif. » Circulez.
« C’est plus du journalisme, c’est de la télé-réalité »
Le leader arborant un pull jaune a préféré s’adonner à une leçon de journalisme pour le moins surprenante. Selon lui, Grand Lille TV s’est livré à un reportage « Trompeur et fallacieux ». Puis il distribue les médailles « Les islamistes main dans la main avec les médias. Je vous rassure, pas tous les médias, il y a encore des gens qui font bien leur travail. » L’homme se lamente d’avoir été filmé en caméra cachée pendant six mois. Le journaliste de la Voix du Nord tente une question, aussitôt Verhassel coupe « vous les dénoncez ces méthodes ? ». Le journaliste souligne alors le dispositif unilatéral de la conférence de presse. Modestement Verhassel répond « c’est vous les réactionnaires » sourire en coin « je veux faire évoluer le journalisme ».
Facile pour Verhassel de dézinguer la chaîne Al Jazeera, il en traîne des critiques plein le net. N’est-elle par pour le moins la meilleure ennemie que peut s’imaginer la Citadelle ? Cette dernière voit l’Islam partout, l’autre l’islamophobie. Il sermonne les journalistes présent.es « c’est incroyable d’avoir si peu de recul sur cette chaîne », « j’ai l’impression que vous avez un peu l’esprit critique sélectif », « la diffusion de nombreux articles de médias sont tout bonnement scandaleux, ça fait honte à votre profession ». Pourtant dans le reportage les faits reprochés sont têtus* et bel et bien filmés : quand la journaliste de Grand Lille TV justement lui demande de revenir sur ces fameux « propos répréhensibles » qu’il condamne, le candide identitaire botte en touche et balbutie « ah non, je n’ai pas le... la liste des propos si vous voulez. Je vais pas revenir là... plus de... Ce reportage est un reportage avec des montages trompeurs fallacieux... ». Étrangement cette séquence n’apparaît pas dans la conférence de presse diffusée par l’organisation Citadelle… Peut-être la faute aux montages « trompeurs et fallacieux » ?
*Verhassel ne s’exprimera pas sur les éléments rapportés dans le reportage : ses relations contractuelles et financières avec le Front National, particulièrement avec Fréderic Chatillon et Nicolas Crochet soupçonnés d’escroquerie concernant les comptes de campagne du FN. Ni sur ses relations personnelles entretenues avec les membres désignés dans le reportage. Bien loin des justifications inextricables, sa défense c’est l’attaque.
Harry Cover
Nous avions interviewé Françoise Vergès, politiste, historienne et militante décoloniale, à l’occasion de la parution en février 2019 de son livre Un féminisme décolonial. Cet essai s’inscrit dans une série de recherches menées sur la domination coloniale et post-coloniale exercée par la France, et particulièrement celle infligée aux femmes descendantes de colonisé.es. Ici, Françoise Vergès met en avant la nécessité de penser un féminisme qui découle des luttes anti-racistes et décoloniales. Si l’interview n’avait pas pu être publiée à l’époque, il nous a semblé pertinent de la ressortir vu le contexte politique récent : mouvement Black Lives Matter, offensives contre les études décoloniales, obsession autour de la figure de l’islamiste…
Auteur notamment de L'ennemi intérieur en 2009 et de La Domination policière en 2012, Mathieu Rigouste est sociologue et chercheur indépendant spécialiste des pratiques policières et des violences d’État. Son dernier ouvrage, Un seul héros le peuple, revient sur la colonisation de l'Algérie par l’État français et de la mise en échec de la contre-insurrection par le peuple algérien, menant à leur indépendance. Pour La Brique, il revient sur son travail, sa fabrique et les leçons à en tirer sur les luttes en cours et à venir. Pour plus d'infos, rendez-vous sur le site du projet : unseulheroslepeuple.org
Une diffusion d'un documentaire réalisé avec l'ouvrage est prévue entre le 10 et le 15 décembre 2020 sur unseulheroslepeuple.org.
Mardi 17 novembre, 6ème chambre du tribunal correctionnel de Lille, 14 heures. Le procès qui s’ouvre revient sur une verrue bien tenace de la capitale des Flandres : l’extrême-droite. Mêlant provocation au terrorisme et à la haine et violences racistes, il vise trois identitaires lillois et fait suite à la diffusion, en décembre 2018, du reportage « Generation Hate » de la chaîne Al Jazeera.
Suite à la mort de Georges Floyd, partout dans le monde et malgré l’interdiction des rassemblements de plus de dix personnes, des milliers de personnes se sont retrouvées en France pour dénoncer les stigmatisations, violences racistes et plus largement le racisme d'état dont font l'objet les personnes racisées. Ce racisme, nié par la majorité de la population, est dénoncée depuis des années, notamment par Assa Traoré et le comité Adama Traoré. Après deux mois de confinement, qui aurait cru que les premières manifestations dénonceraient racisme et violences policières ?