Ce vendredi 23 mars, après deux jours d'occupation de l’amphithéâtre B1 sur le campus Pont de Bois de l'université Lille 3, la direction de la fac de Lille est passée une fois de plus à l'action. Après une sommation durant l'après-midi fixant un ultimatum à 17h00 précise, la directrice générale des services, Marie-Dominique Savina s'est présentée aux portes de l'ampli dix minutes avant l'expiration « demandant » aux étudiant.es de partir pour des « raisons de sécurité ». Le collectif d’étudiant.es refuse de partir, et elle ne veut pas entamer de négociation : « Je ne fais que mon travail » argumente-t-elle. Une étudiante argue le fait que « Nous sommes ici tou.tes majeur.es et vaccinés et que déjà par le passé d'autres amphis ont été occupés » [En tête l'amphi Archimède à Lille 1 occupé durant la loi travail]. Il semblerait que la nouvelle présidence de l'université représentée par Jean-Christophe Camart soit moins enclin à ouvrir le dialogue avec les étudiant.es. Mme Savina explique que l'amphi doit être en capacité de « recevoir du public dans de bonnes conditions ». Un étudiant rétorque alors par : « mais c'est nous le public ! ».
Dialogue de sourds et aucune marge de manœuvre n'est offerte aux étudiant.es qui décident in extremis de rester dans l’amphithéâtre. Des rumeurs avancent que des cars de CRS sont sur le parking. La cinquantaine d'étudiant.es qui avait prévu un grand banquet « frites et musique » se demande s’il va avoir lieu. Marie-Dominique Savina quitte les lieux. Moins de deux minutes plus tard et à peine le temps pour les « insurgé.es de Lille 3 » de barricader l'amphi qu'une trentaine de CRS débarque dans le bâtiment.
Cette évacuation entre en résonance particulière avec les déblocages policiers qui se sont déroulés ces derniers jours en France avec plus ou moins de violence : à Bordeaux, le 7 mars dernier, la police a eu la main lourde contre des étudiant.es pacifistes occasionnant plusieurs blessé.es. Pire encore le 22 mars, à Montpellier des hommes cagoulés et armés de bâtons et de planches en bois évacuent les élèves grévistes.
Ce n'est pas la première fois cette année que la police déloge les étudiant.es mobilisé.es contre la sélection à l'université et les réformes tout azimut du gouvernement. La direction de l'université semble recourir systématiquement aux forces de police pour évacuer les usagers de l'université. En effet, une première assemblée générale -sans volonté d'occupation- avait été écourtée le 28 novembre 2017 par la police à Lille. Puis, le 7 décembre 2017 une conférence qui portait sur la « capacité de la littérature à interroger la violence du monde » en présence d'Édouard Louis et Geoffroy de Lagasnerie avait été interrompue par Philippe Vervaecke, vice-président de Lille 3 de l'époque qui s'était montré fort peu courtois en arrachant le micro des intervenants, faisant des doigts d'honneur, avant de faire intervenir les forces de l'ordre (ou du désordre) craignant une nouvelle assemblée générale du collectif « CRS » (Collectif de Résistance à la Sélection).
Ce soir, l'évacuation fut sommaire et les étudiant.es n'ont opposé aucune résistance. Pendant que les agents de sécurité se sentent pousser des ailes « il est interdit de filmer ici, ne filmez pas les forces de l'ordre ». Un bleu s'écrit : « C'est bon, il reste que les frites ». Ils n’étaient pourtant pas invités.
Le collectif de La Brique
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Addendum :
Les étudiant.es ont toutefois pu récupérer les précieuses frites pour se rendre à l'université Lille 2 (fac de droit) où se tenait à 18h00 un rassemblement contre les incursions violences de milices cagoulées dans les facs. L'amphi E a donc été occupé en réaction, voici leur communiqué :
-- Mercredi 28 mars, appel à manifester partout en France contre les interventions fascistes et policières sur nos campus --
[COMMUNIQUE DES OCCUPANT.E.S
DE L’AMPHITHÉÂTRE E.304 DE LA FACULTÉ DE DROIT DE LILLE]
Lille, le 23 mars 2018
Ce vendredi 23 mars, en réaction aux attaques d'un commando d'extrême droite à la fac de droit de Montpellier, conduisant à l'hospitalisation de plusieurs étudiant.e.s lors de l'occupation d'un amphithéâtre dans le cadre du mouvement de protestation en cours. En réaction aux multiples interventions policières partout en France sur les campus universitaires se mobilisant (Nantes, Bordeaux, Paris, Dijon, Strasbourg, Lille, Toulouse, Grenoble pour ne citer qu'eux). En réaction à l'expulsion de l'amphithéâtre B1 de Lille 3 par les forces de police plus tôt dans la journée, un rassemblement s'est tenu à 18h00 devant la faculté de droit de l'université de Lille. Plus de 200 personnes présentes ont spontanément décidé de s'approprier un amphithéâtre afin de se réunir en Assemblée Générale.
A l'issue des discussions, l'Assemblée Générale a voté :
- L'occupation de l'amphithéâtre de manière indéterminée en réaction aux événements précédemment évoqués.
- La démission de la présidence de l'université du fait de sa décision d'envoyer la police sur ses étudiant.e.s se mobilisant.
- La fin de l'autorisation de faire venir les forces de l'ordre sur les campus universitaires.
Si ces revendications ne sont pas appliquées dans les plus brefs délais, nous, occupant.e.s, promettons de créer le rapport de force nécessaire à l'application de ces dernières. Aussi, l'Assemblée Générale appelle à une journée nationale de mobilisation le mercredi 28 mars contre les interventions policières et fascistes sur les campus universitaires et à rejoindre les manifestations des fonctionnaires, cheminot.e.s, étudiant.e.s etc. luttant contre les réformes ultra-libérales du gouvernement. Partout en France, le 28 mars, soyons dans la rue pour dénoncer le comportement des présidences d'université ayant systématiquement recours aux forces de l'ordre dans les facultés mobilisées.
Flics, Fachos hors de nos facs, on répondra chaque fois qu'on nous attaque.