Bataille urbaine
Une semaine après leur arrivée, les habitant.es de ce nouvel espace de lutte sont expulsé.es. Dehors comme dedans, aucun droit de cité pour ces jeunes réfugié.es. C'est que la mairie de Lille avance ses pions depuis longtemps dans le quartier de Moulins. Un squat de migrant.es près des avant-postes gentrificateurs que sont Saint-Sauveur, le FLOW, la Maison Folie, ça pourrait perturber l’avancée du « ravagement » de façade de ce quartier populaire. Déjà qu’il y a le local de la CNT, l’Insoumise et un tas de locaux militants, faudrait pas trop déconner. La partie de touché-coulé ne fait que commencer. Moulins, c’est une espèce de microcosme menacé par ce qu’on dénonce dans ce numéro : pression sur les exilé.es, invisibilisation des femmes, exclusion des pauvres, embourgeoisement des quartiers.
Ils nous pompent l’aire
Car le pouvoir organise, classe et ordonne l’espace urbain et la vie de ses habitant.es pour mieux les contrôler. Urbanistes, architectes et autres tribuns de la comédie urbaine tentent de dessiner une ville bien rangée où chacun.e serait à sa place. Les bourgeois.es au salon, les pauvres dehors, relégué.es toujours plus loin dans les périphéries. Rénovation, revitalisation, redynamisation... Derrière ces mots, le mépris de la mairie qui exclut les indésirables pour installer la petite bourgeoisie intellectuelle engraissée à la sauce démocratie participative. En cette fin d’année, les lampions éblouissent les âmes dépensières pour faire oublier la présence des cognes à chaque coin de rue. Circulez, circulez, qu’ils nous disent... L’urbain doit être productif et si vous vous arrêtez, il faut que ce soit pour consommer. Arrêtés anti-Rroms, anti-presse libre, anti-mendicité et anti-manifs dessinent un espace sous surveillance, militarisé, au nom de l’état d’urgence permanent.
De l'espace pour nos révoltes
Si la rue est scrutée par l’État, c'est qu’elle a en elle la capacité de fabriquer la révolte et la subversion. Du petit tag aux manifs, en passant par les cannettes partagées sur un banc jusqu'aux occupations des logements vides, la rue produit le collectif. On se rappelle nos nuits debout, place de la République qui n'a jamais été aussi vivante et accueillante. Les terrasses de café où des zicos viennent apporter de la bonne humeur aux discussions et de la saveur à la Jupiler. Les soirs d'été où l'on retrouve les ancien.nes installé.es devant leurs façades saluant les badauds. Les manifs dans les quartiers où l'on se prend à causer avec des gens que l'on aurait jamais rencontré.es ailleurs. Les marchés où l'on vend les clémentines, le poisson et les journaux à la criée, n'en déplaise à Martine Aubry. Bref, occupons la rue, les trottoirs, les impasses ! Rappelons aux riches, qui voudraient être partout chez eux, et à l’État qui nous somme d'être chacun.e chez soi, que nous sommes partout chez nous.
Le collectif de La Brique