Le 29 avril dernier, alors que l'affaire des Panama Papers est révélée au grand jour, une dizaine de jeunes Boulonnais.es demandent aussi « leur part du gâteau ». Ceux-ci envoient farine et œufs sur la devanture d'une des banques accusées d'évasion fiscale : la Société générale. Cette attaque pâtissière commise en public suscitera les foudres des forces policières. Sept mineurs sont amenés au commissariat, dont cinq qui finiront en garde à vue durant près de 24 heures. Le procureur engage contre eux des poursuites pour dégradations. Dans la foulée, l'administration du lycée Cazin de Boulogne convoque plusieurs élèves, les menaçant de sanctions disciplinaires.
Des solidarités militantes et syndicales se mettent en place. Ainsi, dès le 29 avril, plusieurs dizaines d'élèves et délégués syndicaux se mobilisent auprès de l'administration scolaire, contribuant à une levée des menaces. Les syndicats locaux (CGT, Solidaires, FO et FSU) apportent leur soutien aux mobilisé.es qui se concrétise le 1er mai. Le défilé syndical, mené par plusieurs centaines de jeunes, se termine devant le commissariat, où les forces militantes réclament la levée des poursuites judiciaires.
Ces mobilisations s'inscrivent dans une multitude d'actions politiques plus large visant à dénoncer la politique néo-libérale du PS. Le 10 mai, une dizaine de lycéen.nes et étudiant.es tente de bloquer la circulation des bus place de France à Boulogne. Un étudiant est arrêté et menotté devant ses camarades et embarqué au commissariat. Un autre manifestant est arrêté chez lui le soir même. Ils sont accusés d'entrave à la libre circulation, outrage et rébellion à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique. On apprend par la VDN qu'un flic aurait porté plainte pour avoir été légèrement blessé à la main (c'est que le « soulèvement » de jeune, ça fait mal...). Après 48 heures de garde à vue, ils seront jugés le 7 juillet prochain.
Infantilisation d'apprentis "casseurs"
Pour mieux disqualifier la pertinence et la légitimité des actions lycéennes et étudiantes, celles-ci sont perçues comme « des bêtises de jeunesse », des « bêtises de gamins »2 : « les policiers ont sifflé la fin de la récrée »3. Les lycéen.es sont renvoyés à leur bac... à sable. Ces dernier.es seraient « manipulé.es »4, incapables de penser par eux-mêmes. On retrouve la novlangue journalistique et politique, diversion infantilisante évitant de penser les violences policières et la violence d’État comme elles sont et pour ce qu'elles produisent.
En poussant cette logique jusqu'au bout, on pourrait croire que ce discours infantilisant pourrait s'accompagner d'une plus grande légèreté des peines, voire d'une annulation des procès. Outre le fait de garder la tête haute face à ce discours, le collectif des « Jeunes en lutte » s'organise financièrement pour supporter les frais de justice découlant des procès à venir. Mais c'est sur un autre niveau que le collectif s'agite. Puisqu'il ne faut rien attendre de cette justice, ni de cette police qui se sent fragile quand elle veut : il faut anticiper, c'est-à-dire mieux se former, apprendre à manifester différemment, faire davantage circuler les savoirs juridiques. Bref, c'est collectivement qu'il faut apprendre à se protéger et à se défendre face à un pouvoir qui cherche à rendre dangereux le simple fait de manifester.
Panda Bear
1. Média alternatif, La Mouette Enragée relaie des luttes politiques tout en proposant des analyses en termes de luttes sociales et locales.2. Communiqué de la section du Boulonnais des Jeunes en Lutte3. « Boulogne : la police a interpellé un étudiant qui voulait bloquer la circulation des bus », La Voix du Nord, 11/05/2016.4. Déclaration de la direction du commissariat, reprise dans l'article de La Voix du Nord