rès brève histoire du traitement de la délinquance
La prise en charge des « enfants délinquants », depuis le XIXème siècle, n’a cessé les allers-retours entre les espaces fermés et ouverts, donnant tantôt la priorité à l’éducatif (colonies agricoles) tantôt au répressif (colonies pénitentiaires ou encore bagnes pour enfants). La Restauration (1815-1830) fut la première à imaginer l’enfermement pour les mineurs avec les prisons de la Roquette qui étaient des établissements pénitentiaires situés à Paris, dans le 11e arrondissement, de part et d’autre de la rue de la Roquette. Les Parisiens la baptisent vite « La Roquette ».
Un siècle plus tard, l’ordonnance de 1945 est venue instaurer la primauté de l’éducatif sur le répressif (sans définir précisément le terme « éducatif »). La peine et la mesure éducative sont séparées, tout en redonnant un sens éducatif à la peine. Eh oui, la France avait besoin de ses enfants. Il fallait donc les préserver. Pourtant, dans les années cinquante, les nouvelles maisons d’éducation surveillée ressemblaient cruellement à des prisons où « tout était approprié pour détruire un enfant » témoigne Jean-Jean, un ancien pensionnaire (1). L’éducatif se résumait à la « pédagogie frappante ». C’est seulement dans les années 70 que l’éducation surveillée sort de l’univers carcéral, en créant ses propres lieux d’enfermement : les centres d’observations fermés.
À partir des années 80, l’action éducative en milieu ouvert (AEMO) est à la mode pour prendre en charge les jeunes délinquants, avec une approche bénéficiant des apports de la psychologie clinique, de l’éducation populaire ou de la sociologie... L’idée est de préserver les liens existants. L’arrivée des socialistes au pouvoir a mis en échec la loi « Securité et Liberté » du sinistre Peyrefitte qui prônait un discours similaire à ceux entendus aujourd’hui.
En 1993, les premiers Contrats Locaux de Sécurité (CLS) apparaissent. L’objectif est de coordonner les actions de la justice, de la police, de la municipalité et des institutions éducatives après avoir établi un diagnostic de la « délinquance locale ». Depuis dix ans, l’idéologie de la discipline (alliant l’éducatif, le médical et le carcéral) se renforce avec la création de nouveaux établissements. Les premiers Centres Éducatifs Renforcés (CER) ouvrent en 1998. On en dénombre une cinquantaine en 2002 quand sont créés les Centres Éducatifs Fermés (CEF). Le CER est une structure de la Protection Judiciaire de la Jeunesse qui prend en charge les mineurs les plus en difficulté, pendant 2 à 3 mois, sur décision du Juge des enfants, du Juge d’instruction ou du Tribunal pour enfants. Les mineurs sont suivis de manière permanente par des éduc’ et essaient de reprendre contact avec la vie sociale par diverses activités (sportives, chantier humanitaire, …).
Prévus par la loi de programmation du 9 septembre 2002 (Perben), les CEF sont la dernière étape avant la case prison et donc une antichambre de l’incarcération. Selon l’INSEE, le terme "fermé" renvoie à la fermeture juridique définissant le placement, c’est-à-dire que tout manquement grave au règlement du centre est susceptible d’entraîner une détention. Plusieurs possibilités existent pour le placement en CEF : comme alternative à l’incarcération, dans le cadre d’un contrôle judiciaire, pour des mineurs sous écrou (mineurs incarcérés qui bénéficient d’une forme d’aménagement de peine), enfin en libération conditionnelle (suite à une incarcération, le CEF est alors une transition). Il reste que la question de l’incarcération est toujours en arrière-plan.
Avec les Etablissements Pénitentiaires pour Mineurs (EPM), ce n’est donc pas la première fois dans l’histoire contemporaine que l’Etat associe le terme « prison » à la gestion des mineurs : actuellement, certains jeunes passent leur temps en « quartier mineurs ». L’outil médical et son versant psychologie n’ échappent pas à cette logique, à la faveur d’un retour en grâce de courants de la psychologie comme le comportementalisme, qui identifie notamment des caractères innés dans la délinquance. Elle est présentée comme une maladie par des rapports de l’INSERM (Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale) sur le trouble des conduites chez l’enfant et l’adolescent, venant valider les rapports parlementaires ayant trait à la prévention de la délinquance (rapport Bénisti). La « pilule de l’obéissance », comme la Ritaline, en est une illustration parfaite.
Avec les CEF, et surtout les EPM, l’idée est donc de résoudre une question sociale par le pénal. Au XIXème siècle, les « enfants des rues » posaient une question sociale. La réponse, qui a fonctionné, mélangeait lois de scolarisation et de protection sociale, notamment sur le travail des enfants. Aujourd’hui, la population visée a changé et la réponse aussi. Pour les technocrates, les enfants des rues sont devenus les populations des « zones périphériques d’habitat mixte ». Pour être clair : les quartiers de rélégation et les jeunes issus des classes populaires et/ou de l’immigration. C’est peut être pour cela que le gouvernement continue de suppirmer des postes dans l’éducation, que les associations qui créent du lien crèvent à petit feu faute de subventions.
Toute l’idéologie qui inspire ces lois vise donc à « responsabiliser » le mineur, c’est à dire le considérer comme un adulte. Il y a là une dérive qui est inquiétante en regard de ce qui avait été fait aux lendemains de la guerre et ce jusqu’au début des années 90.
Samba
1 : A écouter, l’excellente série d’émissions de « Là-bas si j’y suis » sur l’enfermement des mineurs intitulée « Peine perdue » http://www.la-bas.org/mot.php3?id_mot=57
En attendant les « hôpitaux-prisons » pour pédophiles et autres déclarés fous, de nouvelles prisons sortent de terre : les Etablissements Pénitentiaires pour Mineurs (EPM). Pour répondre aux questions posées par les mineur-e-s, on incarcère à tour de bras et le Nord n’y échappe pas. Le 17 septembre, l’EPM de Quiévrechain (près de Valenciennes) recevait ses premiers « pensionnaires ».
Qu’y trouve-t-on ? Officiellement, un lieu chargé d’appliquer les décisions de justice et d’accompagner la réinsertion. Il « accueille » des jeunes de 13 à 18 ans qui sont placés dans des cellules individuelles (60 par EPM). Ce sont des « prisons-écoles », avec un emploi du temps type du détenu (20 heures d’enseignement, 20 heures de sport et 20 d’activités artistiques par semaine). L’encadrement humain, rassurez-vous, sera important pour chaque mineur-e, muni d’un « binôme référent » composé d’un-e surveillant-e et d’un-e éduc’.
En creusant un peu, on se rend compte que les sept EPM, sous contrôle de l’Administration Pénitentiaire (tiens tiens...), « se veulent les Rolls-Royce de la taule » (1) avec leurs 420 places réservées. Face aux dangers de notre société (émeutes, mouvement social ou autre pédophile de tout poil), une réponse concrète (en attendant la peine de mort ?) s’imposait, visible et autrement plus active qu’un psy discutant des heures avec son jeune à casquette. Douches privatives et terrain de sport servent tout autant la communication ministérielle que « l’enceinte de six mètres de haut, élément porteur de la symbolique de la détention tant pour les détenus que pour le public extérieur », comme le précise une brochure du ministère de la Justice. Ce dernier concède toutefois une « absence de miradors », trop « symbolique ». Ouf ! Rappelons juste, avec Jean-Jacques Yvorel, que la prison est structurellement, depuis 200 ans, un lieu où l’on ne fait pas ce qui est dit sur le papier (2).
Selon Laurent Mucchielli (3), les EPM ne sont qu’un reliquat de la politique sécuritaire mise en place depuis une décennie : « Il est dit depuis dix ans que le pays souffre d’une explosion de la délinquance des mineurs. Or, si augmentation il y a, ce n’est pas pour des faits graves justifiant une incarcération. Il s’agit surtout d’une augmentation du nombre de gamins à qui l’on fait un rappel à la loi ». Les chiffres du ministère de la Justice confirment que le nombre d’enfants mis sous les verrous reste stable. Leur taux d’incarcération tourne autour de 700 : 714 mineur-e-s en prison au premier janvier 1999, 721 au premier mars 2007. Ce qui n’empêche en rien le défoulement collectif sur les ados : « Cet acharnement sur les mineurs traduit les peurs de la société française, liées à des raisons économiques, au développement de la précarisation, à la perte de crédibilité des élites. La société n’est effectivement pas sûre, mais pas sûre de son avenir. On a peur que demain soit pire qu’aujourd’hui. Et l’on désigne un bouc émissaire, un responsable : le jeune. Et de préférence le jeune des cités, qu’on prétend être le contraire de la civilisation, le barbare ». Quand les gens ont peur, il faut donc savoir les protéger et les rassurer : « Avec les EPM, on assiste à un prolongement de la campagne “tout sécuritaire” menée en 2001-2002. Le risque, en faisant une présentation idyllique de ces nouvelles prisons, est que les juges envoient plus facilement les jeunes en taule ».
Outre la surpopulation carcérale, les conditions d’incarcération des majeur-e-s sont incompatibles avec celles des mineur-e-s. Pour autant, les quartiers pour mineurs ne vont pas disparaître : faîtes le calcul, avec 420 places disponibles dans les sept EPM prévus, pour environ 730 mineur-e-s derrière les barreaux. Ce qui pose le problème de leur affectation dans les EPM qui n’est prévue par aucun texte. Les quartiers pour les filles mineures n’existant pas, on peut juste être sûr de leur affectation en EPM où elles ne seront séparées des garçons que la nuit, les EPM étant mixtes.
“ On désigne un bouc émissaire, un responsable : le jeune. Et de préférence le jeune des cités, qu’on prétend être le contraire de la civilisation, le barbare ”
Plusieurs réserves sont émises. Outre l’appel d’air mis en avant par des études prouvant que plus il y a de places en prison, plus on incarcère, se pose la question des moyens. Plusieurs magistrats comme Serge Portelli (4) dénoncent les investissements mis dans les EPM au détriment des centres ouverts. Des juges pourraient être incités à se décider en faveur du placement en EPM, plutôt qu’en milieu ouvert, aux délais d’exécutions des peines plus lents et aux moindres moyens.
Autre élément inquiétant : vu le nombre d’EPM, les jeunes détenu-e-s seront forcément éloignés de leur famille. Dans le Nord, l’ouverture de l’EPM de Quiévrechain devrait entraîner la fermeture du quartier pour mineur-e-s de la prison d’Amiens. Plusieurs associations déplorent cette nouvelle difficulté pour les familles de détenus : encore une fois, l’importance du lien entre les prisonnier-e-s et leurs familles est sacrifiée. Enfin, dénonçant le tout-répressif affiché par le gouvernement, le GENEPI souligne les résultats probants des CEF, moindre mal : le taux de récidive y est de 10 % seulement contre 60 % pour les mineur-e-s sortant de prison (5).
Rétablir la PJJ dans ses prérogatives serait-il suffisant, alors que la tempête sécuritaire et carcérale sévit avec la droite au pouvoir depuis 2002 ? Suffit-il de « remettre dans le rang » celles et ceux qui accusent des histoires personnelles compliquées et complexes ? Si les réalisations de la droite se résument classiquement dans une lutte sécuritaire contre la déviance, les socialistes sont sortis du brouillard pour montrer que la « gauche » aussi était décomplexée. À entendre l’ex-candidate Royal, elle-même fille de militaire, en appeler aux bidasses pour redresser la jeunesse, on se dit qu’il n’y a vraiment plus de temps à perdre pour construire et promouvoir des alternatives à l’incarcération à tout-va.
K.
1 : François Maliet, « En taule dès l’âge de 13 ans », Ce Qu’il Faut Détruire n°33. Merci CQFD et Rue89 pour leurs enquêtes.
2 : Cours donné au Centre National de Formation et d’Etudes de la PJJ de Vaucresson.
3 : Laurent Mucchielli et Véronique Le Goaziou, Quand les banlieues brûlent... Retour sur les émeutes de novembre 2005, La Découverte.
4 : Auteur de Ruptures, d’abord diffusé sur internet, mars 2007, puis édité sous le titre Nicolas Sarkozy, Une République sous très haute surveillance, éditions L’Harmattan, mai 2007.
5 : Assises du GENEPI 2007, Les dernières réformes de la justice des mineurs, évolution ou régression ?
Interview :
Michel est éducateur en métropole lilloise, dans un centre éducatif et d’insertion. Il prend en charge un groupe de cinq jeunes déscolarisés de moins de 16 ans. Il essaye de les remobiliser et les prépare à accéder à leur formation ou à un apprentissage. Syndiqué au SNPES-PJJ (Syndicat national des personnels de l’éducation surveillée de la PJJ), il a accepté de répondre à quelques questions.
Quel est le travail de la Protection Judiciaire de la Jeunesse ?
La PJJ intervient sur trois domaines différents : l’hébergement, le milieu ouvert, où on suit les jeunes dans leur famille, et l’insertion où on prend en charge les jeunes sur des activités de préformation. L’enfermement est quelque chose de nouveau à la PJJ. Il est rangé dans le cadre de l’hébergement, à savoir les CEF (Centre Educatif Fermé) et les EPM.
Depuis sa fondation en 1945, le travail de la PJJ a été de privilégier l’éducatif. Les EPM constituent-ils un tournant majeur ou s’inscrivent-ils dans une suite logique ?
C’est une suite logique qui a pris sa base dans les années Jospin. Le premier ministre Jospin, dans le cadre d’un conseil de sécurité intérieure, avait abordé les histoires de délinquance juvénile. Cela a abouti à la création des UEER (Unité Educative à Encadrement Renforcé) qui sont devenues les CER (Centre Educatifs Renforcés). L’alternance de gauche ou de droite a toujours agi sur le même principe : enfermer les mineurs de plus en plus avec un encadrement renforcé et avec ce vieux complexe de toujours entourer ces projets d’éducatif. Mais l’objectif est là : placer de plus en plus de mineurs.
Le SNPES-PJJ a lancé une campagne contre les EPM depuis 2002 ? Quel bilan en retirez-vous ?
Dès le départ, le SNPES a dénoncé les EPM comme étant l’augmentation de possibilités d’enfermement des mineurs. Aujourd’hui, l’enfermement devient la règle et c’est dans ce cadre que nous dénonçons les EPM. On a essayé de mobiliser la profession mais nous n’avons pas été majoritaires dans les grèves. En même temps, comme nous sommes majoritaires aux élections, notre discours est quand même partagé. D’ailleurs, hormis les EPM à région attractive, très peu de personnels ont postulés pour les EPM, comme à Quiévrechain.
La PJJ avait déjà fait l’expérience de la prison ?
La PJJ est née en 1945. Elle est fille de l’Administration pénitentiaire (AP). Les anciens ont tout fait pour sortir des prisons et de l’AP pour ne faire que de l’éducatif. Aujourd’hui, c’est un retour en arrière avec de vieilles recettes qui ne marchaient pas qu’on nous présente comme des idées nouvelles.
Pourquoi les EPM suscitent-ils vos réserves ?
Aujourd’hui, le discours officiel de l’administration présente les EPM comme des prisons modernes : « On sort les mineurs des prisons pour majeurs. » En effet, ce sont des établissements ultramodernes avec confort et cellulles individuelles mais cela reste des prisons. A l’EPM de Quiévrechain, il y a une salle de muscu qui ferait pâlir les autres salles de la région. Mais cela restera entre quatre murs et quelques fenêtres à barreaux. On a beau mettre du vernis éducatif, notre slogan reste que « la vie ne s’apprend pas en prison ». Les éducateurs arriveront peut-être à contenir les gamins, à les conformer à respecter les règlements internes, mais est-ce qu’on aura réglé pour autant la problématique de ces gamins ?
Vous parlez d’habillage éducatif ?
Il y a une intervention éducative de 7h30 à 21h du lundi au dimanche, pour des activités de formation... c’est à dire ce que l’on fait à l’extérieur, mais dans le cadre d’une maison d’arrêt. Les jeunes n’adhèrent pas forcément toujours. Or, en milieu ouvert, l’objectif est de les faire adhérer au projet. En maison d’arrêt, c’est imposé.
Tous les mineurs délinquants vont-ils être envoyés dans les EPM ?
Il restera des quartiers mineurs dans les prisons. Mais on sait que l’objectif est d’augmenter en nombre les possibilités d’incarcération des mineurs, ces places seront libres et ce sera un appel d’air pour incarcérer les mineurs.
Dans cet ordre d’idées, juges et magistrats ne vont-ils pas être incités à choisir l’enfermement plutôt que le milieu ouvert ?
On peut rendre hommage aux juges des enfants sur l’action qu’ils mènent. Mais c’est vrai que les magistrats vont subir la pression du parquet, la pression politique et la pression de l’opinion publique : l’incarcération des mineurs risque d’augmenter.
Avec la souffrance de l’enfermement en sus, peut-on dire que les ados retrouveront les mêmes logiques dans les prisons que dans les quartiers ?
Aujourd’hui, dans les quartiers mineurs, c’est la loi du milieu qui règne, les caïds, les rackets, les jeunes « mis à l’amende ». Une présence éducative peut amoindrir ces effets mais cela existera toujours. La confrontation entre mineurs est difficile dans les prisons (comme celle des majeurs !).
L’EPM de Lavaur a ouvert sur fond de grève pour dénoncer un manque de moyens financiers et humains. Le mouvement a duré trois jours au terme desquels ils auraient obtenu "un grand chantier" en septembre pour revoir leur régime indemnitaire (les primes). Y a-t-il eu des incitations pour aller travailler dans les EPM ?
L’incitation financière n’a pas vraiment existé. Nous nous sommes donnés comme objectif de tout faire pour que la présence éducative dans les EPM n’existe plus. Nous défendrons les personnels mais il est hors de question de les accompagner dans des luttes qui pourraient pérenniser l’éducatif dans les quartiers mineurs.
Quelle est la continuité entre les EPM, la loi sur la prévention de la délinquance et la loi sur la récidive ?
C’est une suite logique, dans la veine de la communication gouvernementale. Quand il y a un problème de société, on communique sur les effets. On ne cherche jamais à travailler sur les origines. Je n’ai jamais vu un jeune devenir délinquant par plaisir. La politique gouvernementale, c’est dire que les mineurs délinquants sont responsables de leur devenir sans savoir ce qui a conduit à cette difficulté. La suite logique, c’est de les empêcher de nuir et donc de les enfermer. On croit qu’avec les peines planchers on va régler le problème. Je suis persuadé que non . Un jour, il faudra bien libérer ces jeunes et si on ne les a pas préparés, les mêmes causes produiront les mêmes effets. On aura simplement brosser dans le sens du poil l’opinion publique.
Quelles sont les alternatives possibles à l’incarcération ?
Chaque mineur est un cas individuel, a son histoire, sa prise de conscience et son parcours. Ce qui fait la richesse du travail en milieu ouvert de la PJJ, c’est que chaque éducateur fait des propositions éducatives et alternatives au magistrat (éloignement, placement, suivi ouvert avec la famille, séjour à l’étranger...). Il y a tout un arsenal qui permet de coller individuellement au suivi des jeunes. On n’a pas des réussites systématiques car l’éducatif n’est pas une science exacte. Ces jeunes sont avant tout des victimes, qui vivent dans une insécurité depuis longtemps, avec des parcours semés de ruptures dès leur plus jeune âge. En les aidant et les accompagnant, on a plus de chances qu’ils fassent d’autres choix que la délinquance. La répression n’est pas la bonne réponse.
Quels types de personnels à l’EPM Quiévrechain ?
L’EPM de Quiévrechain n’a pas rencontré un grand succès dans les demandes de mutations. Quelques titulaires en ont fait le choix. Mais c’est surtout du personnel contractuel qui a été embauché spécialement et formé sur quelques semaines alors qu’un éducateur de la PJJ est normalement formé sur deux ans. L’école de l’AP à Agen a formé pendant 6 semaines les éducateurs à la vie en prison, car c’est un lieu très sécurisé. La part éducative a été réduite. Ceux qui pensent faire vraiment du travail éducatif en maison d’arrêt risquent fort de vivre quelques désillusions. Ils ne voient pas la logique des gouvernants qui est une politique de répression. On a beau l’emballer d’un beau papier éducatif, l’objectif reste l’enfermement.
Y-a-t-il des mobilisations en cours dans le Nord ?
Pas pour l’instant. Le syndicat souhaite que l’intervention éducative cesse dans les EPM. Je pense qu’elle ne cessera que si les personnels concernés se battent, comme dans les années 1950 quand ils se sont mobilisés pour sortir la PJJ des prisons.
interview réalisée en octobre 2007.