Le 24 juillet 2019, Violette Spillebout , après bien des péripéties, a finalement été investie candidate En Marche à la Mairie de Lille... Une occasion de revenir sur le duel qui l'a opposé à Valérie Petit.
Sortez les pop-corn, le premier round pour le trône municipal commence ! Et ça pique déjà, à coup de petites phrases, de coups bas, trahisons et improbables alliances ! Fermez les yeux, ça va cogner ! Certain.es des futur.es candidat.es dégustent d’ores et déjà quand d’autres esquivent de justesse pour s’assurer la victoire. Le camp En Marche, divisé avec deux candidates à la Mairie, ne sait pas où donner de la tête, pour le plus grand plaisir de Martine.
À la fin de l’été 2018, Valérie Petit, l’actuelle députée LREM de la 9ème circonscription se porte candidate au beffroi lillois. Trois mois plus tard, Christophe Itier, candidat naturel de la macronie locale, renonce à se présenter1. Mais c’était sans compter sur la candidature de Violette Spillebout, une politicienne nourrie au grain socialiste, aujourd’hui largement soutenue par le clan Itier pour remporter la Mairie sous blason d’En Marche. Le match risque d’être serré et les candidates vont tout donner pour monter les marches du podium.
Une même couleur, deux camps irréconciliables
À peine la candidature de Valérie Petit est-elle déclarée que Violette Spillebout s’annonce porte drapeau du clan Itier. Entrée dans le cabinet de Mauroy en 1997, Violette Spillebout a été la dir’cab d’Aubry entre 2008 et 2012 et s’est depuis recyclée à la SNCF en tant que Directrice de la Relation Client et des situations sensibles. Dans le sillage de Violette Spillebout se pressent autant de rejets de la macronie féodale que d’ennemi.es d’Aubry. À commencer par Bernard Charles, ancien conseiller municipal et ex-président de la Mairie de quartier de Lille-Sud qui avait, en 2017, fait l’affront de soutenir le candidat Itier aux législatives. L’outrage lui avait d’ailleurs valu une séance publique de destitution pour le moins humiliante en conseil municipal. Mais l’aversion est réciproque, entre Violette et Martine. En janvier 2018, la Maison de la photographie, tenue par Olivier Spillebout2, le mari de Violette Spillebout, doit affronter la fin des subventions municipales, mettant ainsi à mal les finances du lieu culturel3. Le coup de grâce est dans la foulée donné par l’annonce de Xavier Bertrand et de Martine Aubry de la création de « l’Institut de la photographie » dans le Vieux-Lille. Le couple Spillebout a décidément plus d’une dent contre Aubry…
C’est qui la taulière ?
Ne cherchez pas de photos publiques de Valérie Petit avec Violette Spillebout, même lorsque ces deux-là se trouvent le même jour au même endroit, ni de soutien « républicain » de l’une envers l’autre. Coté presse locale, si Violette Spillebout snobe volontairement sa concurrente, Valérie Petit, elle, voit rouge écarlate ! Fin janvier 2019, lors de ses vœux aux lillois.es, une petite phrase de Valérie Petit fait d’ailleurs bondir les gratte-papiers locaux. Reprises texto, les phrases tombées du camion font les choux gras de la presse : « "Je subis des pressions pour me décourager (...) C'est dur", […] évoquant des "intimidations" et des "menaces physiques" » Pas de noms mais... suivez mon regard. Et c’est le premier coup de savate d’un travail de sape qui vise à savonner la campagne minutieuse et durable de Spillebout à coup de petites phrases assassines4. Spillebout, elle, garde le cap, tacle plutôt Aubry et prône le rassemblement des candidatures d’En Marche sans jamais citer sa concurrente.
De son côté, Valérie Petit ne perd jamais une occasion de rappeler qu’elle a le soutien du national. Ses rares apparitions médiatiques sont d’ailleurs faites de cérémonies officielles avec Jean-René Lecerf (président LR du département), Gérald Darmanin (Ministre LREM des Comptes Publics) et… Martine Aubry.
Et si, au final, tout ce rififi ne profitait qu’à une seule personne ? Martine Aubry ? La proposition est pour le moins intéressante5. En torpillant le camp d’En Marche via Darmanin, donc via Valérie Petit, Aubry divise les militant.es marchistes, fait la nique à son ancienne dir’cab’ et… s’assure plus facilement une place au second tour. La contrepartie d’un petit dîner en tête à tête entre Aubry et Darmanin ? « À moi la mairie, à toi la MEL... »
Harry Cover
- VDN du 16 mai 2018 « Mettons la pression sur ceux qui rencontrent Itier »
- La Brique n°14, A qui profite Lille 3000 ?, « Dans la chambre noire des transphotographiques »
- Vous pouvez retrouver, sur le site de la maison de la photographie, la longue litanie et lente décomposition du lieu sous le terme « presse politique » !
- Dans Le Point du 25/04/19 Valérie Petit ose même dire « Je ne l’ai jamais croisée, ni à La République en marche ni ailleurs »… un peu gros à notre goût.
-
Les Échos du 12/09/2018 « A Lille, les tractations auraient déjà commencé en vue des municipales », l'article dénonce une rencontre entre Aubry et Darmanin qui auraient dîné ensemble à l’hôtel de ville.
La laborieuse campagne de Spillebout dans les quartiers populairesPauvre Violette Spillebout ! Non seulement doit-elle faire face aux dissensions internes et à la froide vengeance du beffroi, mais aussi à l’hostilité des ennemi.es de la démocratie. Elle était pourtant allée chercher l'électorat, les bras grand ouverts dans les quartiers populaires, dont elle devait supposer qu’il l’accueillerait avec reconnaissance.
Ainsi, se tenait à Wazemmes, le 6 mai dernier, au bar le W : Work and Wine, l’une des « réunions citoyennes » de la candidate, organisée par le collectif LilleC (le think tank local de la macronniste). Mais qui s'y frotte s'y pique : une bande d’individus vêtus de noir, ont fait irruption dans la réunion très cosy de ce bar-à-vin-startupo-coworking.
Un peu de chahut, une pinte cassée et une plainte déposée plus tard, c'est la « démocratie » et la « république » en danger ! Suffisamment pour déclencher une opération « apéro-républicain » (avec des verres en carton ?) et de dénoncer « ces agissements violents qui deviennent malheureusement récurrents ces derniers mois dans notre pays » : on est d'accord. Un apéro qui rassemble la fine fleur des élu.es de tout bord, à l’exception notable de la FI, du RN… et de Valérie Petit évidemment.
La police, elle, est invitée pour la réunion suivante. Les fourgons sont prêts à embarquer tous les fauteurs de troubles, qui voudraient amener un peu d’imprévu dans une campagne si bien cadrée. Fringante, ne craignant aucune contestation, Violette Spillebout commence par remercier chaudement les condés pour leur défense de la liberté d’expression. La blague continue, le site Lutte en Nord lâche un bel article sur les relations pour le moins troublantes entre la patronne du W et le site Dailynord (qui a publié pas moins de 38 articles sur Spillebout depuis Août 2018). On y apprend que Gaëtane Deljurie a la double casquette de patronne du W et du site DailyNord : « DailyNord se définit comme une entreprise de presse indépendante. Elle défend donc ses intérêts propres et n’est pas au service d’intérêts commerciaux ou d’influence tiers. » : lit-on sur le site. Ben voyons...
Parce que Wazemmes est devenue une zone de non-droit, la réunion publique suivante se déplace au Polder à Hellemmes. On se dit que le Polder, bar « citoyen et solidaire », est pourtant un lieu qui se dit ouvert aux initiatives alternatives plutôt qu’aux opérations de communication politique de la majorité violente actuellement au pouvoir. On charge la barque : naïveté, inattention manque d'information, imbécillité, népotisme ou cynisme des gérants ? En tout cas, ils acceptent la réunion au nom du sacro-saint slogan « tout le monde peut venir débattre » et de la « liberté d'expression ». On sent bien que quelque chose ne tourne pas rond et que ça se saurait si l'exercice de la démocratie se résumait à des « débats » dont les photos finissent systématiquement sur les réseaux sociaux pour vanter l'adhésion. Promis on vous concocte un article sur « la fabrique du consentement citoyen à coup de think tank ». Est arrivé ce qui devait arriver la veille de la réunion : le lieu est copieusement repeint de vert caca d'oie dans la nuit. Une occasion de plus donnée pour Spillebout de se draper en défenseuse de la liberté et de souligner « le besoin fort [des habitant.es] de transparence et de pédagogie ». Pédagogie qu'on vous dit ! Par contre pour la transparence, il faudra frotter un peu la vitrine. |