Commencé par une journée de manifestation « historique », le mois de mai a abondé, comme les mois précédents, en grèves et mouvements de contestation. Il faut être sourd et aveugle pour ne pas ressentir la colère chaque jour montante des travailleurs et travailleuses, de la plupart des secteurs. Frondeurs et frondeuses ô combien légitimes face aux abus éhontés et impunis des exploiteurs du travail.
Dès la fin avril, un appel à la grève est lancé chez les salarié-es du groupe PPR (Fnac, Redoute, Conforama, etc.), menacés par la suppression de 1900 emplois. Sans sourciller, l’exploiteur Pinault dégraisse sa part salariale et perfuse ses actionnaires à coup de 418 millions d’euros. Dans le même temps, à Ed Fouquières-les-Lens, on bloque le magasin : la direction veut sanctionner arbitrairement certains salarié-es... pour mieux s’en délester. L’action de ces derniers la fait capituler. Pour cette fois.
Le 2 mai, les agents des déchetteries de Valenciennes, Onnaing, Quiévrechain, Quérénaing et Maing débrayent tout le week end, pour la seconde fois en un mois. Les revendications portent sur les conditions de travail de plus en plus inhumaines et l’augmentation des heures de boulot décidée par une direction autiste... qui se fiche pas mal des négociations d’entreprise. Conditions de travail dégradées, c’est ce que les facteurs de la Poste de Tourcoing ― et ceux de Saint-Amand-les-Eaux le 7, de Bondues le 13 ― dénoncent le même jour en interrompant la distribution du courrier.
Le 4 mai, les salarié-es du magasin calaisien Au bout du quai baissent le rideau. C’est carrément leurs salaires que la direction n’a pas versés, préférant se sortir de ses soi-disant « difficultés économiques » plutôt que de payer honorablement ses employé-es. A Lille, la mairie va devoir affronter un appel à la grève dans le service municipal de restauration... puisque, gagnée par la logique capitaliste, elle tente allègrement de mettre ses agents au régime sec .
Alors que des pneus sont cramés devant l’usine douaisienne Inoplast par ses grévistes ― sur le piquet depuis seize jours ―, six salariés passent devant le TGI le matin du 7 mai... pour « blocage d’usine ». La hargne patronale n’a pas de limite. Le même jour à Petite-Synthe, une grève est déclenchée dans la société sous-traitante Boccard (maintenance industrielle). Les négociations nationales entre direction avide de profit et syndicats acquis au marché accordent le dégraissage aux boss. Ici, personne n’a eu vent de ces odieux pourparlers : vingt salariés en font les frais.
Le 12 mai, plus de mille salarié-es d’ArcellorMittal tentent de pénétrer dans une assemblée générale des actionnaires tenue à Luxembourg. Pour répondre à leurs revendications, on leur envoie la police. Au même moment, à Arras, l’usine de sous-traitance automobile Akebono se prend une grève illimitée dans le pare-brise : la direction impose à ses employé-es un chômage partiel dès juin... sans accorder de compensation de salaire. Sans gêne.
A Faurecia, dernière usine d’Auchel, la mobilisation a été la plus longue, la plus dure, mais aussi la plus « victorieuse ». Vingt jours de blocage en mars n’avaient pas suffi à la direction de l’équipementier pour comprendre l’ampleur de l’angoisse et de la colère des ouvrier-es apprenant la fermeture de leur usine pour 2010. Le 29 avril, alors que la grève avait repris depuis une semaine, CRS et vigiles armés de leur chien montent la garde afin de « permettre l’évacuation de milliers de pièces bloquées dans l’usine et le réapprovisionnement [de la chaîne de] production », selon la méprisante préfecture du Pas-de-Calais. Otant au passage leur droit de grève aux Auchellois-es.
Le 4 mai, les dirigeants affrètent deux bus pour faire pénétrer non-grévistes et techniciens récupérés sur d’autres sites. Mais ils ne passent pas le barrage, et en solidarité, les usines de Marles-les-Mines, Hénin-Beaumont, Saint-Michel dans les Vosges sont bloquées. Le 7 mai, les négociations reprennent. Le piquet de grève est maintenu, les vigiles aussi. Le 11 mai, sur le site Toyota d’Onnaing, les chaînes de production de la Yaris ne peuvent plus tourner, faute de pièces. Il faudra attendre une semaine avant que la direction du groupe capitule. Au final, une partie de l’activité sera maintenue à Auchel et de nombreux salarié-es, écœurés par les sales coups patronaux, seront transférés vers d’autres sites.
En ce mois de mai,voilà que les entreprises de transport en commun de la région refusent justement d’être baladées. Comme à Valenciennes le 11 mai. Ou à compter du 25 sur le réseau Transpole, fier générateur de précarité. Mais ce sont aussi - il est malheureusement impossible de les énumérer tous ici - les producteurs de lait, les salarié-es de la vente par correspondance, de l’agroalimentaire, de la grande distribution, les employé-es hospitaliers, les travailleur-euses sociaux, toujours les universitaires, les agents des cantines scolaires, les gaziers, etc., qui se dressent humblement contre les tenants du libéralisme, de l’économie de marché et de la précarisation salariale.