« Je dansais, comme d’autres au sous-sol. On a entendu des cris d’affolement et vu des gaz suffocants descendre vers la cave. Il a fallu quelques minutes pour être totalement asphyxiés, sans possibilité de sortir. Quand la porte s’est ouverte, tout le monde s’est dirigé vers la sortie sans violence mais les policiers matraquaient à notre passage. Je prends un coup de poing dans le ventre, un ami derrière un coup de matraque aux côtes. Dans le fourgon, je découvre les plaies sur les visages. »
II« Arrivées au commissariat, les femmes sont séparées des hommes et menottées en attendant la fouille. Un médecin est réclamé pour un homme ayant reçu un jet de lacrymo de près : son visage est rouge et de ses yeux toujours fermés sort un liquide blanc. »
III« Aucune sommation pour nous prévenir de la présence de policiers. J’ai été l’un des premiers à sortir, mains levées, disant à haute voix « Je ne bouge pas » avant d’être violemment plaqué au sol et frappé dans le dos. Un policier a appuyé son genou sur mon visage en me sommant de me taire (« Ta gueule ! »), entravé avec des serflex et traîné au sol sur cinq mètres avant de me faire assoir. Je rappelai que j’étais comme eux, fonctionnaire d’État, chose à laquelle ils me répondirent en me traitant de « sale con », de « gauchiste ». J’ai signifié que je connaissais mes droits. J’ai eu pour seule réponse « Ici, le droit n’existe pas. La loi c’est nous ». »
IV« Je me suis alors sentie jetée au sol, en tas, plaquée contre d’autres personnes : « Ta gueule et bouge pas ». Après plusieurs dizaines de minutes, je parviens enfin à ouvrir les yeux et découvre le tas humain au milieu de la route dont je fais partie. Des fourgons arrivent, nous comprenons alors que nous allons être emmenés au commissariat. En route, nous demandons à l’agent la raison de notre interpellation, sa réponse est : « J’en sais rien ! » avec un léger sourire. »
V« Au poste, ce sont insultes et humiliations (« parasite, gauchiste, pouilleux, bâtard, tu verras quand on se retrouvera à la fouille et que tu seras seul »). Ce n’est qu’après la troisième fouille (complètement dénudés) qu’on est libérés des menottes. Des coups pour ceux qui réclament une explication. Quant à l’accès aux toilettes, on nous répond de nous « pisser dessus ». Ne pouvant se retenir, certains urineront dans la geôle. On aura eu à manger, en plus de 15h de garde-à-vue, un sablé et une brique de jus de pomme. »
VI« Tout s’est passé dans une incertitude complète. Même les policiers qui sont arrivés au cours de la journée semblaient surpris de la nature comme de l’ampleur de cette garde à vue. Je n’ai vu une avocate qu’en fin d’après-midi, après mon interrogatoire. »