La Zone de l’Union est l’une des plus grandes friches industrielle de France. Elle couvre 80 hectares sur trois communes : Roubaix, Tourcoing et Wattrelos. Dès les années 70, elle aiguise les appétits de la Chambre de Commerce et de la Communauté Urbaine. Mais le pharaonique centre tertiaire attendra quarante ans avant de sortir de terre.
En 1993, « l’Union » est désignée futur « pôle d’excellence » et le projet d’aménagement urbain se met en route. LMCU sort l’artillerie lourde : l’EPF* du Nord-pas-de-Calais (cf. Lexique) doit faire place nette. Les habitant-es sont éjectés au prix de très fortes pressions, les terrains sont rachetés, les maisons murées et des rues entières démolies. La SAEM « Euralille »* et la SEM « Ville renouvelée »* sont chargées d’imaginer et de planifier ce nouveau projet. Au crayon à papier et à la souris, c’est le cabinet d’architectes et d’urbanistes « Reichen et Robert & Associes »* qui, en 2004, a été désigné pour dessiner et transformer en images de synthèse cet énième « quartier du futur ». Derrière lui, ce sont de nombreux cabinets d’architectes qui viennent imaginer les différentes composantes du projet.
Un projet flou
Les plans du cabinet d’architectes n’englobent la totalité de la Zone. La première salve de travaux a commencée, mais il en faudra beaucoup d’autres pour réinvestir la totalité du site. Lors des réunions de présentation, les décideurs n’ont pas l’air très à l’aise. On peine à comprendre l’unité. « C’est que le projet est en perpétuelle réinvention »1 se justifie le président de la SEM*. En attendant, il commande aux étudiants en urbanisme des « projets de transition », sur des terrains qui n’abriteront pas de bâtiments avant au moins dix ans.
Les industriels à l’Union
Le quartier s’organisera autour d’un parc urbain de 15 hectares. D’ici 2011, le Centre Européen des Textiles Innovants (CETI) devrait se créer aux abords de la Tour Mercure2. Un projet de 40 millions d’euros porté par André Beirnaert, président de l’Union des Industries Textiles du Nord et du « pôle de compétitivité » Up-Tex3. « Il s’agira d’un des plus grands centres de recherche textile européen concentré dans un même lieu. Ses travaux porteront sur le développement de nouveaux matériaux textiles qui trouveront des applications aussi bien dans le domaine spatial, l’aéronautique et l’automobile que dans la santé » explique Stephan Verin, délégué général d’Up’Tex 4. L’union est ouverte aux industriels.
Aujourd’hui, dans l’ancienne filature Vanhoutryve, une très sobre et très inspirée Plaine Image accueille déjà les professionnels de ce que certains appellent la « culture » : Télé Melody, chaîne poubelle de variétés et de télé-achats de la TNT ; Ankama, éditeur de jeux vidéo comme Dofus, ou Reflets-Vidéo, producteur de films publicitaires.
Pour le reste, nous n’avons accès qu’a des estimations. La SEM « Ville renouvelée »* prévoit l’implantation d’« hôtels d’entreprises », sur le modèle de ceux d’Euralille II 5. 3000 logements devraient se répartir sur 70 000m2. Le tout pour un coût avoisinant les 200 millions d’euros. On imagine la taille du fiasco si le projet venait à capoter. Mais même en cas de « réussite », il reste pensé à court terme. On est prêt à parier que dans cinquante ans d’autres « gouvernants » raseront et « moderniseront » de nouveau cet espace.
1 : Jean Badaroux à la Maison de l’architecture et de la ville le 24 septembre.
2 : Construite le long du canal dans les années 70. Symbole de la volonté de réinvestissement du site par la Chambre de commerce. Mais le projet avait échoué.
3 : Membre élu de la Chambre de Commerce et d’Industrie, il est surtout ancien directeur de l’usine La Lainière de Roubaix, siphonnée par les actionnaires en 2000.
4 : http://www.zdnet.fr/
5 : cf. La Brique n°5