Sevelnord, licenciements tranquilles

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Le groupe PSA se partage avec Fiat l’usine nordiste de véhicules utilitaires. Mi-novembre, il annonce 4000 suppressions de postes en France en 2012. Le tout sans « plan social » ni grèves ni effusions de sang. « C’est un plan machiavélique » nous dit Franck, salarié à Sevelnord. Méthode.

 

Il y a encore quatre ans, dans l’usine de Lieu-Saint-Amand, il y avait 4200 personnes. Aujourd’hui, ils ne sont plus que 2450, et la direction a prévu d’en foutre à la porte 600 d’ici l’année prochaine. Devant l’Assemblée nationale, le ministre de l’industrie Éric Besson a rassuré la piétaille d’encravatés en affirmant qu’il n’y aurait « pas de plan social, aucun licenciement, ni aucun plan de départ volontaire ». Comprenez : « Je ne veux pas de bordel social », analyse Franck du syndicat CNT de Sevelnord. Alors comment vont-ils s’y prendre ? Petit à petit, en faisant du cas par cas.

Pas vu, pas pris

Depuis trois ans, la direction enchaîne les « départs volontaires » pour baisser les effectifs. Aujourd’hui, elle appelle chaque personne individuellement pour leur dire que leur poste va être supprimé. Si au bout de trois, quatre ou six mois, les gens n’ont pas démissionné contre trois mois de salaire, c’est la dégradation : on les renvoie à la chaîne. Après quinze ou vingt ans de boîte à cracher du profit, voilà comment la direction considère ses ouvriers : elle multiplie les licenciements disciplinaires ou pour inaptitude au travail ; au mieux, les salariés sont mutés de manière forcée à 200 ou 300 bornes de chez eux. Et que font les salariés ? « Ils gambergent ». Ils se regardent en chiens de faïence en se demandant qui sera le prochain. Et la chefferie multiplie les mises à pied pour des prétextes bidons comme le fait d’être mal garé sur le parking de l’usine. L’ambiance se dégrade. La mobilisation des salariés est inexistante.

Procuration médiatique

Si le 19 novembre la première manifestation pour sauver l’emploi et dire « Stop à l’austérité » a rassemblé 1 500 personnes à Valenciennes – élus locaux en tête –, pour Franck, « tout ça, c’est de la mascarade, une mise en scène médiatique ». Car à l’intérieur de l’usine, niet, nada. Pas un jour de grève n’a été annoncé, pas même une intersyndicale ne s’est organisée : « Ils dégraissent sans que ça leur coûte un centime et avec l’assentiment des syndicats collabos » nous dit-il, désabusé. En effet, FO ou la CFDT ne veulent pas brusquer la direction et disent attendre de nouveaux investissements. « On trompe les gens, tout est verrouillé. Moi je veux mettre les gens devant leurs responsabilités. On ne peut pas chialer à l’extérieur et ne rien faire à l’intérieur ». En attendant, c’est les patrons de Peugeot qui doivent se taper sur les cuisses. Que ce soit au Brésil, en Russie, en Inde ou en Chine, qui va les empêcher de délocaliser sinon les salariés eux-mêmes ?

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