3 novembre 2008. Un « sommet » à Vichy. 27 ministres européens, en pleine élection d’Obama, pour harmoniser les politiques sur « l’intégration » des immigré-es. La repentance consumée, Hortefeux pavane. Il fait coup double : renforcer les politiques de fermeture des frontières et faire hoqueter l’histoire et la mémoire dans une danse macabre inquiétante.
Vichy et l’immigration sont les deux ingrédients d’une recette explosive qui joue avec nos mémoires, sélectives par définition. D’un côté, ne pas faire de comparaison erronée, de l’autre, invoquer la mémoire contre « un passé qui ne passe pas » [1]. Bien sûr, à la télé, on a parlé des « désobéissants » déguisés en juifs version 1943, avec une étoile marquée des mots « sans-papiers » ou « étranger » [2]. Initiative salutaire ou nauséabonde ? La réponse ne nous appartient pas. La Brique n’est pas dans l’histoire du passé, mais bien dans celle du présent et des derniers effets des politiques migratoires européennes près de chez nous.
DéTraque ordinaire
Au lycée Robespierre d’Arras, Jaouad est menacé d’expulsion depuis le 21 novembre, après plus de 5 ans de présence. Même chose pour Wang Xiao qui signe un contrat pour un bac pro en alternance, rejeté par la préfecture et la direction du travail pour dépassement du quota horaire imparti.
Yilmaz Türkmen est venu « visiter » le centre de rétention de Lesquin, après avoir refusé d’embarquer à Roissy. Ses deux enfants ont attendu sa remise en liberté par la Juge des Libertés de Lille. En effet, il a été arrêté en se présentant à la préfecture de l’Essonne pour demander des nouvelles de son dossier. Selon un témoignage [3], la juge a conclu « en disant que l’interpellation en préfecture d’une personne venue apporter des éléments à son dossier par un policier de permanence, c’est " limite guet-apens " ».
A côté de Lesquin, une famille arméno-azerbaïdjanaise menacée d’expulsion vers la Russie. Les enfants sont scolarisés à Wattignies (école Desrousseaux et collège Voltaire). Profs, CPE et direction s’activent.
De Calais.
À part ça, le charter qui devait expulser 54 Afghans a été annulé. La mobilisation à Calais, Lille et ailleurs ne fut pas pour rien dans cette reculade d’Hortefeux, pressé par la Cour européenne des droits de l’homme. Cette chasse aux Afghans a vu des dizaines de CRS pénétrant dans une des jungle calaisienne pour rafler (7/11). Hélicoptère, blocage des associatifs et Jean-Claude Lenoir, de l’association SALAM, arrêté de façon musclée et mis en garde-à-vue pour outrage.
De son côté, le collectif C’Sur met un terme à la distribution des repas le midi. Réclamant plus de moyens et d’engagement des autorités, les bénévoles sont à bout devant une situation qui ne change guère depuis la fermeture de Sangatte par Sarkozy version 2002. Toujours sur la côte, ce sont ces 40 policier-es qui encerclent le campement (environ 80 Afghans et Irakiens) de Loon-Plage près de Dunkerque (18/12). Après les arrestations, tentes et abris de fortune sont rasés au bulldozer, avant d’être reconstruits par les mêmes réfugié-es. Fin décembre, le campement de Grande Synthe a lui aussi été vidé de ses occupant-es. De petites histoires diraient certain-es, qui montrent qu’ici, de Calais à Lille, des résistances s’organisent face aux politiques qui ont valu un sommet de l’immigration dans le lieu symbolique qu’est Vichy. Nous aussi, nous pouvons faire hoqueter la mémoire, mais ça, c’est une autre histoire.
Numéro 11, janvier 2009
Les infos sur la forteresse
http://lille.indymedia.org/
http://www.dissidence-nordiste.org/