Ça décide d'emblée de squatter le quai du Lille-Paris de 9h13 de la gare Lille-Europe. Les militant.es passent dans les wagons de la première classe – bourgeoise – pour distribuer des tracts et tenter de trouver quelques député.es du coin parti.es pour plusieurs jours de débat parlementaire sur la loi Travail.
Dans la gare, ça s'agite, la clique policière est au rendez-vous. Une vingtaine de CRS accompagnés de BACeux et flanqués de quelques RG envahissent le quai alors que les slogans résonnent dans la gare : « El-Khomri, c'est tabou, on en viendra tous à bout ». Un contrôleur tente de les amadouer : « Laissez juste partir le train mais après vous pourrez rester ».
Député.es, gare à vous !
S'installe alors un climat étrange : ça se mate entre quatre yeux avec les CRS immobiles tandis que le train prend 20 minutes de retard. En fin de compte, le cortège décide de poursuivre l'action à la gare Lille-Flandres. Le cortège se scinde. Une partie décide de traverser Euralille – le monstre de la consommation lilloise – aux cris de « Haou, haou, anti-capitalistes ! ». Les vigiles en bon soldat de la violence d'État tentent de casser le cortège. Des baffes fusent pour flanquer à terre caméras, appareils photo et smartphones afin d'empêcher les captations vidéos. Ça monte d'un cran quand deux ou trois manifestant.es se font cogner dessus. L'apogée est atteinte lorsqu'un manifestant à terre se ramasse des coups de pieds par trois vigiles nourris à la testostérone. La machine est rodée, le prolo tape sur le prolo en échange d'un peu de pouvoir et d'un salaire de misère.
Apathie politique sur le Lille-Paris
Le cortège étudiant finit par s'extraire d'Euralille. Les CRS les attendent droit dans leur bottes, mais les laissent finalement s'engouffrer dans la gare Lille-Flandres tandis que les employés de la SNCF tentent vainement de fermer les portes. Direction le quai du Lille-Paris pour un tractage syndical auprès des voyageurs.
La maréchaussée installe un barrage filtrant au milieu du quai afin d'empêcher l'entrée dans le train. Les keufs se font contrôleurs SNCF et vérifient les tickets des voyageurs ayant eu l'audace d'accepter un tract. Les passager.ère.s semblent anesthésié.es par le métro-boulot-dodo. Lorsque les étudiant.e.s les interpellent : « N'oubliez pas que si vous avez des vacances, des acquis sociaux, c'est parce que des gens ont lutté ! », certains reçoivent au mieux des regards interrogatifs, au pire l'éternelle apostrophe paternaliste : « Va travailler ! ».
C'est qu’une grande partie de la population ici présente ne semble pas être habituée à battre le pavé : à 120 euros l'aller-retour Lille-Paris, seul.e.s les costards-cravates-tailleurs en CDI peuvent se payer le prix du billet. Pourtant tout le monde sera bien impacté par le démantèlement du code du travail. A l'heure où "Hé Oh la gauche" tente de sauver les apparences d'un gouvernement aux abois, il serait bon ton de crier "Hé Oh réveillez-vous !" à toutes celles-et-ceux qui croiront pouvoir échapper aux griffes du Médef. Vers 11h, les CRS chassent les dernier.es militant.es encore adossé.es aux trains pendant que la manifestation se disperse.
Si le PS persiste dans sa politique d’endoctrinement sauvant le bon peuple à grands renforts de cadeaux fiscaux au patronat et de démantèlement du code du travail, cette journée montre que la lutte ne démord pas à Lille.