Après un passage au Tribunal Administratif, un autre au Tribunal de Grande instance et les décisions couperets de maintenir quatre camarades en rétention, avaient lieu aujourd’hui un procès en appel à la cour d’appel de Douai et un rassemblement place de la République à Lille.
La journée avait mal commencé. La PAF embarque à la sortie du métro un sans-papiers en route pour rejoindre la manifestation. Il sera relâché une heure plus tard, après vérification de son identité... La foule, inquiète, peut de nouveau respirer et se concentrer sur son objectif du jour : marcher jusque Lesquin si quatre camarades encore en rétention y sont maintenus à l’issue du procès en appel qui a lieu à Douai.
Après trois heures de délibérations, il est aux alentours de 16h quand le verdict tombe. Les téléphones portables sonnent, vibrent. Les soutiens à Douai annoncent leur libération. La rétention administrative est levée pour les quatre personnes qui restaient enfermées au CRA de Lesquin. C’est un soulagement général. La décision du juge est « une victoire pour tou-tes les sans-papiers et pour le CSP ». Contrairement à leurs deux compagnons libérés deux jours auparavant [1], aucune assignation à résidence n’a été prononcée à leur encontre, ce qui pourrait permettre d’enclencher des recours pour casser cette mesure qui laisse ces deux personnes en proie à l’expulsion.
« Une belle victoire et une décision importante »
Cette décision du juge est une jurisprudence capitale pour le mouvement lillois, mais également pour tou-tes les sans-papiers qui luttent en France. Comme le clamait le CSP depuis des jours, les arrestations de la police, le jour de l’occupation du local de l’UMP, étaient illégales [2]. Ceci ayant été reconnu par la juge, plus aucun sans-papier ne craindra l’expulsion s’il est arrêté lors d’une occupation. Les conséquences judiciaires pourront se porter sur des actes pénalement répressibles éventuellement commis lors de celle-ci, mais ne pourront entraîner une procédure en lien avec la situation administrative de la personne. Sauf à enfreindre la loi - ce dont est coutumière la préfecture du Nord - c’est une reconnaissance importante du droit des sans-papiers à manifester, à faire entendre leur voix, à lutter par les moyens qu’ils ont actuellement choisis. L’occupation, rappelons-le, est un outil de lutte auquel le préfet s’expose, du fait de son mutisme et de son obstination, à force de refuser de recevoir le CSP59 en délégation.
« Traité-es comme des chiens, nous allons gagner comme des lions »
Nous ne marcherons pas sur Lesquin, pas aujourd’hui du moins. La joie au cœur, la foule se met en marche à travers Lille pour rejoindre le local du CSP59 et retrouver les camarades libérés ainsi que les autres soutiens revenant de Douai. Une fois sur place, accolades, esclaffes, sourires, larmes aux yeux, les retrouvailles sont belles. Les quatre camarades libérés sont accueillis sous des applaudissements chaleureux. Les chants des sans-papiers résonnent une nouvelle fois, fiers et justes. Les personnes enfermées disent quelques mots à l’assemblée : « Vous étiez avec nous en rétention (…) merci, merci à toutes les personnes du CSP et aux soutiens ». Une personne de l’assemblée leur répond : « Maintenant que vous êtes là, nous pouvons dormir ». Le CSP et ses membres ressortent fort-es de la solidarité dont ils récoltent aujourd’hui les fruits. Cet instant est apprécié par tous et toutes, mais chacun-e sait ce qu’il reste à accomplir : « Nous avons gagné une bataille, mais pas la guerre. La lutte doit continuer ! » Nouveaux applaudissements nourris. Elle continuera ! Parce que seule la lutte paie.
La Brique publiera très prochainement sur son site Internet un compte-rendu complet de l’audience à Douai ainsi que les prochains communiqués du CSP59.
W.R
[1] Les « six » du CSP devant le Tribunal de Grande Instance, labrique.net
[2] « La guérilla urbaine » ne fait que commencer, labrique.net