"Les bons de Noël, vous irez aux Assedic pour les toucher ! » [1]. Le patron de l’imprimerie Thirion à Tourcoing n’a pas apprécié la grève début septembre. Surnommé « le Tapie des Vosges », il s’était offert l’entreprise en 1991. Des 170 emplois, il n’en restait que 29 en 2008. À l’annonce d’un nouveau plan social et d’une délocalisation de l’imprimerie, les ouvriers stoppent le boulot, une première depuis plus de 15 ans. Trop tard, la liquidation est prononcée trois semaines après...
À l’usine Norzinco d’Anzin, un piquet de grève s’installe le 17 octobre : le groupe Recyclex entend fermer le site, avec 34 licenciements à la clef... Nous pourrions citer également la grève des salarié.es de Nike à Roubaix, des brasseries Heineken à Mons, de la coopérative ID5 à Loos-en-Gohelle, celles du personnel de Météo France, des médecins, des pompiers, des journaleux de M6, des profs, des fonctionnaires, des retraité.es.
Salarié.e ou esclave ?
Mais ces deux derniers mois, c’est le secteur du nettoyage qui a fait parler. L’exploitation y est plus sévère qu’ailleurs [2] . À l’hôpital de Seclin début octobre, les femmes chargées de l’entretien tiennent tête à leur employeur durant cinq jours. La boîte privée Sin & Stes venait de remporter à nouveau le marché du nettoyage de l’hôpital... et en profitait pour licencier et pressuriser encore plus le personnel. Résultat du conflit : paiement des jours de grève, maintien des emplois et de l’ancienne organisation du travail. « Le nettoyage a gagné sa première bataille » [3]. Espérons qu’il y en ait d’autres !
« Nous sommes des agents de nettoyage, nous ne sommes pas des esclaves » [4], lance à son patron une salariée de l’entreprise de nettoyage GSI Vitronet, sous-traitant de Dalkia, pour le compte d’ArcelorMittal Dunkerque (sic). Après les récents licenciements, deux salariées refusent un nouveau changement dans leur journée de boulot. La direction les convoque en entretien, le personnel se met en grève le 7 octobre.
Le soir-même, une vingtaine de grévistes de la société Derichebourg, qui assure le nettoyage nocturne du métro, occupent la station Eurotéléport. Motif ? Les licenciements, la pression, les menaces de l’encadrement et les conditions de travail.
En septembre, les communaux de Croix débrayent : le maire désire virer quatre employé.es en déléguant le service du nettoyage à une boîte privée. À la fin du mois, c’est au tour des salarié.es de Shanks Nord, qui s’occupent du ramassage des poubelles autour de Valenciennes : ils réclament le paiement de leurs heures de nuit...
La récession arrive, les piquets aussi
Et le mouvement à La Poste ? Bien sûr on ne l’a pas oublié. Ils étaient des centaines de grévistes dans la région, le 23 septembre. Espérons que cette journée ne soit qu’un apéritif pour empêcher la privatisation.
Reste que les mois prochains risquent d’être chargés en arrêts de travail. Afin de maintenir les taux de profit en pleine crise économique, nombre de boîtes prévoit de mettre tout ou partie de leurs travailleur-euses sur le carreau. D’ores et déjà, des milliers d’intérimaires ont été renvoyés.
À La Redoute, après un mois de grève en avril et un récent débrayage pour soutenir deux salarié.es convoqués par la direction, l’annonce de 670 suppressions de postes va faire monter la colère. De même à Hénin Beaumont, après la liquidation de la Camif.
Des licenciements collectifs sont également prévus dans l’industrie automobile, à Renault et MCA (Maubeuge) ou Sevelnord (St Amand). Mais aussi à la papeterie Cascades (Blendecques), à Noyon Dentelle (Calais), à AstraZeneca (Dunkerque), chez Arc international (Arques), où la direction prévoit 600 suppressions d’emplois d’ici 2011, après être passée de 12 000 à 6000 salarié.es en cinq ans.
Des menaces sérieuses pèsent aussi à Myriad (Louvroil), à Bridgestone (Béthune), à Faurecia (Hénin Beaumont), à Valeo (Étaples) et STA (Ruitz), chez EDS (Villeneuve d’Ascq), etc. Autant de batailles à venir... Qui a dit que la lutte des classes était finie ?
[1] « Le Tapie des Vosges frappe aussi à Tourcoing », Liberté Hebdo, 26/09-02/10.
[2] Surcharge de travail, stress, horaires éclatés (tôt le matin, tard le soir, la nuit), différents lieux de travail, pressions et mesures punitives des petits chefs, etc. À relire : « Nettoyage sous-traité, personnel sacrifié », La Brique n°8, juin-sept 2008.
[3] « Les petites mains du nettoyage se rebiffent », Liberté Hebdo, 10-16/10.
[4] « La sous-traitance ou les esclaves d’ArcelorMittal ! », Site internet de la CGT ArcelorMittal de Dunkerque.