En novembre, Hortefeux présentait sa politique sécuritaire, faisant la part belle à la vidéosurveillance, que les membres du gouvernement préfèrent appeler « vidéoprotection », dans une guerre des mots qui ne nous a pas échappé.
L’objectif affiché, d’ici 2011, est de doter les rues de France de 60 000 caméras, c’est-à-dire de tripler leur nombre actuel. 28 millions d’euros sont débloqués à cet effet. Soixante-quinze villes devraient être équipées en 2010. Le partenariat avec le secteur privé va être étendu. Dans notre région, Wattrelos, Marcq-en-Baroeul, Courrières, Le Touquet font partie de ce premier lot dans lequel l’État cofinance l’installation (à hauteur maximale de 50%). D’autres villes n’attendront pas les subsides de l’Etat et s’activent déjà : Bondues, Marquette, Linselles, Neuville-en-Ferrain… la liste est longue.
Vidéoprospection
Comme si ça ne suffisait pas, l’État envoie ses militaires en guise de « VRP » de la télésurveillance : ainsi, dans le canton de Wormhout, les maires ont reçu les gendarmes pour être informés sur la mise en service de caméras : « Une installation dissuasive et efficace » [1], Selon les propos de Philippe Sola, commandant de la compagnie de Dunkerque. Sans contredire le bidasse, La Voix rapporte ses propos visant à prouver que ce système apporte toutes les garanties au niveau des libertés individuelles : « Ce n’est pas un moyen de surveillance, mais une dissuasion à condition que le système soit visible et en fonctionnement. » Ces opérations se sont répétées à Calais ou à Saint-Pol.
L’avant-garde sécuritaire
Par ailleurs, certaines mairies n’ont pas attendu les effets d’annonce pour passer à l’action. Alain Poyart, le patron-maire d’Avesnes, est donc loin d’être isolé. On peut d’ores et déjà compter un bon paquet de villes équipées, de Bousbecque (où c’est le maire qui est derrière les écrans de surveillance !) à Saint-Quentin, d’Arras à Halluin où Christian Vanneste a participé au financement sur son enveloppe parlementaire...
Bien sûr, ce rapide panorama est incomplet, car il faudrait comptabiliser toutes les caméras « privées » ou assimilées qui se multiplient dans nos rues. Ainsi, Transpole et ses milliers de caméras ne sont pas uniques : dès cette année, à Valenciennes, le Tram a lui aussi été équipé de caméras.
En débattre, c’est déjà l’accepter
La guerre idéologique autour de la vidéosurveillance fait rage, mobilisant les chiens de garde. En novembre, La Voix du Nord révélait, suite à un rapport du ministère de l’Intérieur, l’impact « significatif » de la vidéosurveillance sur la délinquance. De l’autre côté, Le Monde relayait cette étude de T. Le Goff et E. Heilmann, sous le titre « Un rapport qui ne prouve rien », qui démontre l’inefficacité de cet outil. Les deux universitaires estiment que le rôle de la vidéosurveillance dans l’élucidation des faits est « marginale ». « Dans l’échantillon retenu de 63 gendarmeries, 770 faits ont été élucidés grâce à la vidéosurveillance en 2008, soit 12 faits par an et par brigade, autrement dit un par mois » [2]. C’est sur ce modèle de riposte que se calquent les villes (souvent) de gauche qui refusent ou contestent la vidéosurveillance. Le tout sans exiger sa suppression pure et simple. Et d’embaucher des flics de proximité, comme c’est le cas à Amiens ou à Montreuil.