MUNICIPALES : Jusqu’au bout du consensus Aubry

Les élections municipales ? Des “nouveaux” rapports de force et des nouvelles pas si... nouvelles : confirmation de l’abstention, recul électoral de l’extrême droite et une gôche de plus en plus “plurielle”.

Dans le Nord, l’abstention se maintient par rapport au dernier suffrage de 2001 en dépassant les 50 % dans les trois grandes villes de la métropole « lilloise ». Elle augmente à Lille et Roubaix au second tour. Elle atteint même plus de 60 % dans cette dernière pour le premier tour où le maire socialiste, René Vandierendonck est élu à peine avec 21% des inscrit-e-s (l’abstention était de 55 % en 2001 et 41 % en 1995).

 À Lille, au second tour, Martine Aubry est réélue triomphalement avec seulement 35 000 voix pendant que l’abstention pointait à 55,6 % (pour 124 000 inscrit-e-s et 212 414 habitant-e-s dont Hellemmes et Lomme). Sa victoire, Aubry la doit donc à 28 % de l’électorat lillois. Dans le quartier de Moulins, 61 % d’abstention et un plébiscite pour la liste PS qui plafonne à 79 %. A Lille-Sud et à Fives, où 75 % des voix sont pour Aubry, 58 % ne se déplacent pas. Même à Saint-Maurice Pellevoisin, 51 % d’abstentionnistes contredisent les 57 % de la maire. Pour un Sébastien Huyghe, son logo en coeur et sa «  maison des lillois » sur la place de la République, ou pour l’association apolitique « M Lille » appelant à voter Martine Aubry, qui avait elle-même comme slogan « L’avenir aime Lille », la rupture pointerait-elle son nez ?

Les élections changent la vie... des partis politiques.

Mais l’enjeu n’était pas tant la réélection au siège municipal de l’ancienne salariée de Péchinay que la présidence de la communauté urbaine. Pour se l’assurer, en plus de jouer à la super-Aubry en sauvant des gens au bord du suicide1, elle s’est arrangée en rassemblant le plus largement possible : elle réconcilie « sociale-démocratie » et «  social-libéralisme », de l’ex-UDF aux Verts et aux communistes, marchant dans la droite ligne consensuelle de Pierre Mauroy.

Pour cela, elle ne pouvait trouver mieux que le «  rejet de la politique de Sarkozy » et le «  partage du projet issu de toutes les sensibilités de la gauche ». Ce sont en effet les deux conditions de l’accord de gestion municipale trouvé avec les Verts, au lendemain du premier tour, afin d’intégrer Jacques Richir (MoDem) à la majorité municipale. Le MoDem, relégué à un petit 7 %, trouve donc un réel accord politique, annoncé juste après le dépôt officiel des listes le 11 mars. Un accord car il faut sauver l’élection de Martine Aubry à Lille Métropole Communauté Urbaine (18 avril). En contrepartie, PS et MoDem s’arrangent dans d’autres communes du coin comme à Saint-André ou à Roubaix, où le PS n’a pas attendu le second tour pour rallier le MoDem à sa liste. Le parti de Bayrou continue de jouer au centre commercial.

Pour faire avaler l’arrivée de Richir, anciennement dans l’opposition de droite, Aubry accorde aux écologistes douze places sur la liste fusionnée, dont dix éligibles, quatre adjoints à Lille et six conseillers communautaires. Un statu quo malgré leur recul de trois points par rapport au dernier scrutin municipal (11,58 % contre 15,52 % en 2001). Eric Quiquet, tête de liste des Verts, accepte ce qu’il refusait encore au soir du dimanche 9 mars : «  Tout ne se passe pas à Lille seulement, il y a l’enjeu de la communauté urbaine (LMCU) ». Six places de conseillers communautaires valent bien de se salir les mains avec la droite molle.

Ne gâchons pas le plaisir, la bonne nouvelle vient de Christian Vanneste qui se prend une rouste, et ce dès le premier tour ! Toujours à Tourcoing, le Front National continue de crever, tout en perdant la bataille d’Hénin-Beaumont. Ne rêvons pas, le vote frontiste reste régulier : à Hénin, Briois fait quasiment 29 % et Eric Dillies atteint quand même les 5 % à Lille ! Tout cela dans une région à certains relents identitaires qui ne sentent pas bon. Et le FN garde ses fondamentaux : à Calais, le candidat «  anticommuniste » FN se retire au second tour, contre l’avis du borgne, au profit d’une coalition anti-soviétique qui fait perdre à Jacky Hénin et aux communistes un de leur dernier bastion hexagonal. De quoi poser la question du futur traitement des réfugié-es, qui faisait déjà pas mal couler notre encre avec la municipalité précédente.


1 : « Tentative de suicide : Martine Aubry et un adjoint sauvent une jeune femme » en couverture de La Voix du Nord le 22/02/08.

AD et CG